C’était une des ces journées assez ensoleillées et douces, que les vampires n’aimaient guère. Dehors, on pouvait voir que les rues étaient désertes, ou presque, avec seulement quelques humains qui se faufilaient entre les bâtiments.
Les appartements de Cole Parler étaient tout aussi calmes. Seul un bruit de pas pouvait être entendu. C’était Anna Smith, l’une des deux esclaves attitrées du maire de la ville de Desteria. Du haut de ses talons aiguilles, elle entra dans le living, la plus grande pièce du logement. Comme tout le reste de l’appartement, la salle était plutôt fraîche et austère, mais la présence féminine permettait de rendre l’endroit un petit peu plus joyeux. Armée d’un chiffon et de quelques produits d’entretien, la jeune rousse venait de commencer le ménage, qu’elle devait faire chaque jour. C’était son travail ici, et en quelque sorte la raison de sa survie dans cette ville. A cet instant, elle était parfaitement seule ici : Cole était à sa marie, et Sheiley, sa seconde « esclave », devait se reposer dans sa chambre, suite à une raclée que son maître lui avait infligée la veille…C’était pendant ce genre de moment, quand l’appartement était vide et silencieux, qu’Anna préférait faire son nettoyage, loin de tout stress…
Comme la plupart du temps, la pièce la plus sale était le living et c’est là qu’elle avait l’habitude de commencer le nettoyage. Au sol, beaucoup d’objets cassés, vases, vaisselle…pour lesquels la jeune fille supposait que la chute et la casse avaient davantage été provoquées volontairement que lors d’une dispute ou d’un accident. Mais surtout, c’étaient des bouteilles d’alcools vides, dont une certaine part était brisée, qui jonchaient le sol terne et froid. Anna soupira et se mit à genoux. C’était peut-être l’une des choses qui l’avaient le plus surprise concernant les vampires : la quantité d’alcool qu’ils pouvaient boire en une seule soirée… La rousse commença à ramasser les plus gros débris, pour éviter de se blesser. Puis elle se leva et partit dans la cuisine, avant de revenir quelques secondes plus tard, un grand sac poubelle dans les mains. Elle se remit à quatre pattes devant les objets brisés et les mit dans le gigantesque sac plastique. Elle continua ainsi un certain temps, devant même prendre un second sac. C’est en ramassant une moitié de vase ancien qu’elle remarqua un petit détail qui sortait de l’ordinaire. Elle se rapprocha de l’objet. C’était une bouteille. Pas une bouteille vide, semblable à toutes celles qu’elle venait de ramasser, non, mais une bouteille à demi remplie. Dans ses souvenirs, jamais Cole n’avait laisser une bouteille non finie. Anna la prit dans ses mains. C’était de la vodka. Combien de temps n’en avait-elle pas goûté déjà ? Ca remontait à si loin, elle ne s’en souvenait pratiquement plus. Elle rapprocha de goulot de son nez, ferma les yeux et sentit l’odeur…Et elle se souvint. Elle avait 18 ans, c’était à New York, quand elle vivait encore avec son père. Avec ce père alcoolique qui était parti au bar du coin se soûler, elle en avait profité pour sortir la bouteille de la réserve personnelle de son père et d’en prendre un verre…C’était ça la dernière fois où elle avait bu de la vodka. Un sourire mélancolique s’afficha sur son visage. C’était si loin. Elle posa ensuite le goulot sur ses lèvres et but une gorgée. Elle émit une petite toux, surprise par cet alcool fort qui lui racla la gorge. Rapidement, elle sentit ensuite la boisson passer dans son corps et la réchauffer, la revigorer. Elle reprit une petite gorgée, puis reposa la bouteille au sol…
Après cela, elle reprit son activité de petite ménagère, ramassant les nombreux débris et bouteilles vides qu’il restait. Dans ce silence mortuaire, elle n’entendit pas que quelqu’un derrière elle l’observait depuis peu de temps. Puis elle l’entendit lui parler et, surprise de cette venue prématurée, elle posa sa main sur un gros morceau de verre. Sur le coup, elle émit un petit gémissement et regarda sa main, saignante.