Kaneith Brothers
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.


La ville damnée des frères Kaneith
 
AccueilAccueil  Dernières imagesDernières images  RechercherRechercher  S'enregistrerS'enregistrer  ConnexionConnexion  
Le deal à ne pas rater :
Cartes Pokémon 151 : où trouver le coffret Collection Alakazam-ex ?
Voir le deal

 

 Bdabalouchnapouff

Aller en bas 
AuteurMessage
Edgar Fitzpatrick

Edgar Fitzpatrick


Nombre de messages : 24
Race : Vampire
Date d'inscription : 27/02/2009

Bdabalouchnapouff Empty
MessageSujet: Bdabalouchnapouff   Bdabalouchnapouff EmptyDim 1 Mar - 2:32

Et ce jour là, il peuvait en enfer

Je vais vous raconter une histoire…

Je suis mort le 13 juillet 2007 à 8h05 p.m. d’un arrêt cardiaque à l’âge de 43 ans. Et, ce jour là, il pleuvait en Enfer.

« Il manque quelque chose à votre histoire » me disait l’éditeur au téléphone.

Encore une fois, un de mes manuscrits avaient été refusés. Ce n’était rien qu’un échec de plus. Ce n’était rien que de l’argent de perdu. De la nourriture de moins sur la table. Du temps réduit à néant. De l’encre gaspillée ainsi qu’un arbre mutilé inutilement pour en faire du papier. Juste un millième projet à mettre dans son cercueil. Mais, quelques heures après, ce fut moi qui mis les pieds dans ma tombe. Puis, ce fut le tour du reste de ma carcasse, soigneusement mis dans le grand coffre en bois, après avoir été lavé et habillé par des mains inconnues. Des mains appartenant à un être blasé, elles étaient froides et d’un morbide accablant. C’était comme se faire palper par un cadavre. Mais, entre ce pauvre type qui me regardait avec des yeux vagues dans un silence macabre et moi, qui était le mort?

« Il manque quelque chose à votre histoire » me disait l’éditeur au téléphone. Et, ce jour là, il pleuvait en Enfer. Je suis l’écrivain damné. Car il n’y a pas plus maudit que l’auteur qui n’a jamais rien publié de sa triste vie. Je suis un écrivain tellement damné que même si je publierais quelque chose, pas la moindre personne connaîtrait mon nom car je n’en aurais aucun à mettre sur la page couverture. Je suis l’écrivain damné sans nom, celui qui n’a jamais rien publié de toute sa vie.

« Il manque quelque chose à votre histoire » me disait l’éditeur au téléphone. Et, ce jour là, je suis mort. C’est donc le 13 juillet 2007 à 8h05 p.m. que je suis mort d’un infarctus.

« Arrêtez de fumer, faites attention à votre alimentation et faites de l’exercice » m’aurait dit le médecin quelques années plus tôt.

Mais, je ne suis pas aller voir le médecin. Un écrivain qui ne publie pas n’a pas d’argent à donner à l’hôpital et un sans nom n’a pas d’assurance pour payer la note. Et les damnés iront tous en Enfer un jour de pluie.

Je suis mort seul. Je suis mort chez moi. Tout ça parce que le médecin ne m’a pas dit quelques années plus tôt « Arrêtez de fumer, faites attention à votre alimentation et faites de l’exercice ».

Mon corps désespérément immobile fut retrouvé quelques jours plus tard. Et, ce jour là, il pleuvait toujours en Enfer. Il fut retrouver non pas par un ami car je n’en avais pas, ni par ma femme inexistante ou par un employeur ou collègue imaginaire, mais par le propriétaire de mon appartement qui attendait mon loyer. Car, même si on est damné et sans nom, on a toujours besoin d’un toit pour se protéger de la pluie des Enfers.

Je fus enterré. Et j’attendais sagement dans ma tombe que le Diable où l’un de ses subalternes daignent venir me chercher.

« Arrêtez de fumer, faites attention à votre alimentation et faites de l’exercice » m’aurait dit le médecin quelques années plus tôt pour m’empêcher de vivre cette attente morbide.

« Il manque quelque chose à votre histoire » me disait l’éditeur au téléphone. Mais quoi? Pourquoi ne m’a-t-il pas dit ce qui manquait? Peut-être ne serais-je pas mort si j’avais su. Si j’avais su…

J’attendis qu’on vienne chercher mon âme. Mais, en attendant, les insectes me rongeaient. Les verres vinrent abandonner leurs larves dans mon estomac, ceux-ci remontant par mon œsophage et me sortant par la bouche pour y laisser un goût répugnant sur ma langue.

Après des jours, des mois et des années, mes amis, ces horribles insectes charognards, ne venaient même plus me visiter tant il ne me restait plus rien pour les nourrir. Ah, mes quels amis infidèles pour me quitter ainsi à jamais une fois que je n’ai plus rien de moi à leur offrir. Exaspéré d’attendre, je me m’y en route moi-même vers les Enfers. Je trouverais le chemin tout seul. Blasphème que de m’avoir fait attendre aussi longtemps. J’ai brisé le couvercle de mon cercueil et me mis à creuser la terre avec mes ongles. J'aurais voulu hurler de rage, mais personne ne m'aurait entendu. Quand j’eus enfin fini, j’étais dans un cimetière et il pleuvait comme en Enfer. Où trouverais-je ces flammes que je trouverais si salvatrices après ce que je venais de vivre? Il y avait une porte, quelque part, qui conduisait aux Enfers? Un escalier peut-être? J’aurais prié la Mort ou le Diable pour qu’il vienne me chercher. Mais, j’avais attendu si longtemps…Si longtemps…Je trouverais le chemin tout seul.

« Arrêtez de fumer, faites attention à votre alimentation et faites de l’exercice » m’aurait dit le médecin quelques années plus tôt. Oh, mon cher ami fictif, comme j’aimerais vous rassurer en vous disant que mon infarctus aura été mille fois plus doux que ces années passées dans la tombe.

« Il manque quelque chose à votre histoire » me disait l’éditeur au téléphone. Je savais à ce moment là trop bien qu’est-ce qu’il manquait. Une fin. Car c’est bien ce que je souhaite plus que tout au monde. Que mon histoire prenne fin. Que ce soit une fin douce et heureuse ou une fin dramatique et oh combien douloureuse, je m'en fiche. Je veux seulement une fin.

Après de nouvelles années d’errance, je pus finalement trouver l'issue. Ma fin. La mienne. L’horriblement douce porte qui menait là où il pleuvait. Et, ce jour là, il pleuvait en Enfer. La porte était fait d’un bois qui semblait banal et vieilli. Mais, la poignée, elle…C’était autre chose…Ça ressemblait à de l’or, mais ça ne pouvait pas l’être car elle était rouillée. Et pourtant, c’était bien ça. L’or ne rouille qu’en Enfer.

J’ouvris la porte et descendis un escalier fait de ténèbres denses. Je marchais sur des ombres entassées, littéralement. La porte se referma.

Et, ce jour là, il pleuvait en Enfer.

Il pleuvait. Mais, ce n’était pas de l’eau. Il pleuvait en Enfer. Il pleuvait du pétrole. Du pétrole nourrissant les flammes qui allaient me faire oublier ma chair rongée pendant si longtemps. Les fournaises du Diable m’attendaient avec impatience. Et, ce jour là, il pleuvait en Enfer, il pleuvait de l’or noir. Rien que pour moi…Rien que pour moi…

Je me suis approché des flammes. Les gouttes noires que le ciel infernal produisait me tombaient sur la tête. Je me suis couché sur le feu de l’Enfer et m’endormit paisiblement. Il faisait enfin chaud dans la mort. Je n’étais plus mordu par de minuscules bouches d’insectes mais complètement dévoré par les flammes. Et c’était si bon…Si bon…

Quand le Diable vint enfin me réveiller, il m’adressa un sourire chaleureux.

Il me donna une tape amicale dans le dos. Ses mains étaient douces. Son regard serein. Son sourire empli de compassion. Son visage tellement beau. Mais, cet acte de compréhension, bien que sûrement hypocrite, ne fit que provoquer une violente douleur sur mon corps meurtri par le feu.

Il me conduisit alors dans une pièce sombre et vide. Vide, si ce n’était que ce bureau, cette chaise, ce papier, cette plume et ce pot d’encre.

« Tu n’as plus à arrêter de fumer, surveiller ton alimentation ou faire de l’exercice. Mais, je veux que tu écrives…Ton histoire est finie… »

Il me sourit et me regarda avec amusement. En rien ses yeux ou son expression me semblait sadique ou moqueur. C’était un sourire amusé mais bienveillant et amical. Ah, la vermine, l'hypocrite.

« …Mais tu ne l’as pas encore mis sur papier ».

Je m’assis donc sur la chaise qui était fait d’un métal glacial qui martyrisait mes brûlures. La plume qui devait me servir pour écrire restait collé à ma main, m’obligeant à user de toutes mes forces pour l’en retirer ce qui, à chaque fois, provoquait une douleur haïssable à un tel point qu’aujourd’hui, je n’ose plus chercher à l’enlever. Le papier était rêche ce qui me faisais toujours grincer des dents quand j’y touchais. L’encre…C’était du pétrole. De la pluie infernale. Ah, la vermine, l'hypocrite.

J'ai commencé à écrire, assis sur l’horrible chaise, la haïssable plume trempée dans la triste ironie de mon encre de fortune, ma main frottant sur le papier qui me râpait la main, sur ce bureau…Un bureau tout à fait normal. Mais, un bureau entre quatre murs. Un bureau en Enfer.

J'ai commencé à écrire. Car les écrivains damnés et sans nom doivent faire des romans pour la bibliothèque du Diable. Car les écrivains damnés qui n’ont jamais publié publient en Enfer.

Je posais le bout de la plume sur le papier. J’écrivis…

« Je vais vous raconter une histoire… »

Je constatais à quel point j’étais seul dans cette pièce où je devais écrire. Je constatais aussi à quel point ma solitude avait toujours été si profonde.

« … Je suis mort le 13 juillet 2007 à 8h05 p.m. d’un arrêt cardiaque à l’âge de 43 ans… »

Je constatais à quel point mon histoire n’était pas finie. Je constatais à quel point elle ne finirait jamais.

« …Et ce jour là, il pleuvait en Enfer. »
Revenir en haut Aller en bas
 
Bdabalouchnapouff
Revenir en haut 
Page 1 sur 1

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
Kaneith Brothers :: Pour relaxer un peu :: ||| Créations :: ||| Écriture-
Sauter vers: